Un comparatif des dispositifs de lutte contre la corruption : loi Sapin II, Bribery Act et FCPA

Le 9 décembre 2016, la loi Sapin II, qui agit contre la corruption et la fraude fiscale, a été promulguée. Ce dispositif est venu répondre à une exigence internationale de prévenir des malversations et encadrer les entreprises françaises dans la mise en place de leur politique anticorruption. Cette loi s’aligne sur les dispositifs anglo-saxons relatifs à la corruption, soit le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) et le UK Bribery Act. Loi Sapin II, UK Bribery Act et FCPA : quelles différences ?

Loi Sapin II :

Ce texte, qui vise à lutter contre la corruption, a entraîné la mise en place de l’Agence française anticorruption (AFA). En 2017, l’AFA avait établi 8 mesures préventives régissant les entreprises comptant au moins 500 employés et dont le chiffre d’affaires excédait les 100 millions d’euros. À la suite d’une consultation publique qui a eu lieu en 2020, l’AFA a actualisé ses premières recommandations. Les 8 mesures ont été réformées, cédant la place à 3 piliers principaux : l’engagement du corps dirigeant, la connaissance des risques de corruption et la gestion des risques au sein de l’organisation.

Un dispositif qui s’inspire des lois anglo-saxonnes

Pointée du doigt par l’OCDE, La France a adopté la loi Sapin II afin de pallier ses manquements en termes de réglementations anticorruption. En effet, ce dispositif s’est calqué sur le FCPA et le UK Bribery Act afin de répondre à l’impératif international de conformité. Il a pour objectif de faire reculer la corruption non seulement en France mais aussi à l’étranger grâce à des actions préventives et répressives. La transparence étant essentielle à la bonne gouvernance des entreprises, la loi Sapin II s’est articulée autour de l’éthique, la conformité et la prévention des risques.

Les différences entre la loi Sapin II, le UK Bribery Act et le FCPA

En 2010, le UK Bribery Act a été adopté en Grande Bretagne afin de réprimer la corruption dans les sociétés privées ainsi que dans les institutions publiques. Le  Foreign Corrupt Practices Act, qui comprend un volet comptable et un autre consacré à la lutte contre la corruption, a lui été adopté en 1977 aux États-Unis. Si l’objectif de ces trois dispositifs est semblable, les mesures imposées diffèrent.

Les entreprises enregistrées ou cotées sur une bourse américaine, quelle que soit leur nationalité, toute personne physique ou morale et les personnes pratiquant une activité économique sur le sol américain doivent se plier au Foreign Corrupt Practices Act. Le UK Bribery Act lui concerne les organisations enregistrées en Angleterre, les personnes d’origine britannique et tout individu qui exercent une activité en Angleterre. La loi Sapin II s’applique à toutes les sociétés, d’au moins 500 employés et récoltant un chiffre d’affaires supérieur à 100 millions d’euros, ayant leur siège social en France. Les filiales des entreprises étrangères, dont le siège social est basé en France, sont aussi concernées si elles remplissent ces deux critères. On note ici la nature limitative de la loi française. D’ailleurs le directeur de l’AFA a fait ressortir en 2017 qu’un nombre important des filiales des sociétés étrangères ne font pas l’objet d’évaluation. Et pour cause, les moyens d’investigation sont inadéquats !

Autre frein que rencontre l’AFA est la portée de son autorité à l’international car elle n’est pas reconnue comme l’institution légitime pour réprimer les actes frauduleux. Cette responsabilité revient au parquet. Les autorités étrangères, comme le Department of Justice des États-Unis ou le Serious Fraud Office du Royaume-Uni, pourront en revanche agir contre les entreprises pour les faits de corruption déjà contrôlés par l’AFA.

Par ailleurs, les procédures de contrôles comptables internes exigées par l’AFA dans le cadre de la loi Sapin II sont plus sévères. Les services comptables de la société ou un commissaire aux comptes interviennent en général pour s’assurer que les comptes ne sont pas utilisés pour commettre des délits fiscaux. Le FCPA adopte la même ligne directrice en exigeant la délivrance de rapports comptables qui fournissent des informations exactes sur les opérations de la société. Le UK Bribery Act se montre plus souple en préconisant la transparence et la mise sur pied d’un comité d’audit pour élaborer des rapports.

La loi Sapin II oblige aussi les entreprises à dresser un code de conduite pour éclairer toutes les parties prenantes sur les comportements pouvant être considérés comme des faits de corruption ou de trafic d’influence. On peut y voir une innovation car elle encourage les entreprises à contribuer activement à la lutte contre la corruption, notamment au travers des formations destinées aux cadres et personnels les plus exposés aux risques de corruption et de trafic d’influence. En revanche, le FCPA et le UK Bribery Act recommandent d’instaurer un code de conduite et exhortent les entreprises à avoir recours à des formations pour sensibiliser les employés aux risques de corruption. Non obligatoires dans les deux cas, les entreprises doivent d’elles-mêmes prendre ces initiatives.

Conclusion

Si les trois lois partagent la même vocation, elles officient chacune à leur échelle pour contrer la corruption et réguler la machine financière des mastodontes. Toutefois la loi Sapin comporte des limites en matière d’extraterritorialité contrairement aux FCPA et UK Bribery Act. L’AFA est en effet habilité à sanctionner les ressortissants français ou les entreprises établies en France pour des faits de corruption mais ne pourra pas les défendre contre les autorités étrangères pour ces mêmes faits. Son rôle en matière de lutte contre la corruption est cependant non négligeable. Elle s’inscrit dans une démarche de prévention en ciblant et encadrant les entreprises particulièrement exposées aux risques de fraudes.

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